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L’électrification intelligente au service de la transition énergétique

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MADEA : L'Anisotropie magnétocristalline

Le comportement des matériaux ferromagnétiques est fondamentalement régi par les interactions d'échange entre proches voisins qui conduisent à un arrangement des moments magnétiques atomiques parallèles les uns aux autres. On constate néanmoins que les diverses orientations ne sont pas équivalentes en ce sens qu'il est plus « facile » d'aligner l'aimantation sur certains axes cristallographiques appelés pour cela axes de facile aimantation que sur d'autres. Cela est lié à l'organisation cristallographique qui fait que les propriétés environnementales d'un atome dépendent fortement de la direction considérée, à la différence de ce que l'on observerait au sein d'un liquide ou un matériau amorphe.

Cette anisotropie est dénommée anisotropie magnétocristalline et provient de l'interaction électrostatique entre les orbitales des électrons responsables du magnétisme de l'atome et du champ électrique lié à la distribution de charges de l'environnement et dénommé champ cristallin. Cet effet d'anisotropie se manifeste au niveau du moment atomique global par l'intermédiaire du couplage spin-orbite qui rend donc indirectement le Spin sensible au champ cristallin.

 

Il s'ensuit donc que les substances dont les atomes magnétiques présentent un moment orbital L nul (on parle alors d'état S car ne subsiste que le moment de Spin) ou faible donneront lieu à une anisotropie magnétocristalline faible. Les composés issus du groupe du Fer, Nickel, Cobalt, réalisent ce cas de figure, soit parce qu'ils sont naturellement à l'état S (Mn2+, Fe3+), soit parce que leur moment orbital, conséquent à l'état libre, se trouve « éteint » par le champ cristallin.

A l'inverse, les composés issus des Terres rares présentent un moment orbital élevé et donneront lieu à des anisotropies magnétocristallines marquées liées à l'importance du couplage Spin-Orbite.

 

On rend compte de l'anisotropie magnétocristalline en exprimant la densité volumique d'énergie libre Fk qui lui correspond au moyen d'un polynôme développé en fonction des puissances croissantes paires des cosinus directeurs ai de l'aimantation, exprimés dans un repère lié à la maille cristalline. La valeur des coefficients associés aux différents monômes diminue très vite avec l'ordre de ceux-ci, de sorte qu'on se limite généralement au premier ou aux deux premiers termes du développement. L'expression analytique est fonction de la symétrie cristalline.

MADEA : Figure axes polaires MADEA : Figure polaire energie d'anisotropie magnetoscristalline

 

Figure 1 : Représentation polaire de la densité d'énergie d'anisotropie magnétocristalline pour une symétrie cubique réalisant K2 = 0, pour une direction d'aimantation contenue dans le plan contenant les trois directions principales. L'énergie étant définie à une constante près, on attribue à la direction [001] l'énergie K0 afin de faciliter la représentation.

Pointillés (K1>0) : les directions faciles sont les arêtes de la maille, les directions difficiles coïncident avec les grandes diagonales.

Trait continu (K1<0) : les directions faciles sont les grandes diagonales, les directions difficiles coïncident avec les arêtes.


Cas des systèmes cubiques

Les axes du trièdre de référence sont les arêtes du cube décrivant la maille. On a :

MADEA : Olivier Equation 46

Si K1 est positif, alors les directions faciles sont les arêtes du cube -cas du fer-, alors que pour K1 négatif, les directions faciles sont les grandes diagonales du cube (cas du Nickel).

On peut illustrer sur le cas particulier de l'alliage FeSi utilisé dans les toles de transformateurs (3% Si en masse) la signification concrète de cette énergie : avec K1 = 3,5 104 J / m3, on devra fournir pour faire passer l'aimantation de la direction facile  MADEA : Olivier Equation 49 à la grande diagonale du cube  MADEA : Olivier Equation 47 l'énergie volumique :

MADEA : Olivier Equation 48

Cas des systèmes de basse symétrie

Dans le cas de systèmes à plus basse symétrie, (cas du Cobalt par exemple qui cristallise dans le système hexagonal compact), on a un axe privilégié (cf figure 2) et le développement s'écrit alors :
MADEA : Olivier Equation 50
où  MADEA : Olivier Equation 45 représente l'angle entre la direction d'aimantation et l'axe principal.
MADEA : Figure symétrie hexagonale

Figure 2 : repérage des directions dans une symétrie hexagonale. L'angle f n'intervient qu'au niveau du troisième terme du développement de Fk

 

Limitée à l'ordre 2, cette formulation coïncide avec l'expression de la densité d'énergie magnétocristalline pour les systèmes quadratiques ou rhomboédriques. Limitée au premier terme, cette expression donne une densité d'énergie d'anisotropie uniaxiale, généralement obtenus suite à un recuit effectué sous champ magnétique ou contraintes appliquées. On parle alors d'anisotropie induite, ces traitements s'appliquant à des matériaux présentant une densité d'énergie magnétocristalline intrinsèque très faible (Fk<100 J/m3) tels que alliages FeNi de type Permalloys, ou amorphes et nanocristallins doux.

De manière générale, on remarque que l'anisotropie magnétocristalline est plus marquée dans les systèmes de basse symétrie que dans les systèmes de haute symétrie. C'est ainsi que dans le cas du cobalt, avec K1=53.10^4 J/m3, on devra fournir pour faire passer l'aimantation de la direction facile à une direction difficile l'énergie volumique  E=Ku=53.10^4 J/m3, soit 45 fois plus que pour le FeSi. Pour parvenir à ce résultat, il aura fallu appliquer un champ d'excitation dans la direction difficile d'amplitude Hk=2K1/Js=616 kA/m. Hk est dénommé champ d'anisotropie.

Il s'ensuit donc que l'amplitude des effets d'anisotropie est en premier lieu conditionnée par la catégorie à laquelle appartient l'élément concerné (éléments de transition 3d ou 4f) et ensuite déterminée par la symétrie présentée par le système étudié.

 

On peut enfin comparer l'amplitude du champ d'anisotropie au champ moléculaire. On peut illustrer  le cas des composés 3d à l'aide du Cobalt, pour lequel on a µ0 Hk/Bmol= 4 pi 10-7 616/3,42 = 0,2 . Il apparaît clairement que les effets d'anisotropie sont sans commune mesure avec la force des interactions d'échange.

Ces effets sont pourtant de première importance vis-à-vis des applications : pour ce qui est de l'utilisation des matériaux doux, les champs d'excitation mis en œuvre sont de l'ordre de quelques 103 A/m (cas des machines tournantes), voire seulement quelques 102 A/m (cas des transformateurs de distribution) ou même beaucoup moins encore (disjoncteurs différentiels à hautes sensibilités) et donc tout à fait insuffisant pour imposer des directions d'aimantations hors des directions faciles, au moins pour les éléments purs. On contourne cette difficulté par la texturation des matériaux quand cela est possible (cas des tôles de transformateurs FeSi) ou en élaborant des alliages à faibles anisotropies, conditions pour lesquelles on obtiendra des alliages à hautes perméabilités. On s'intéressera alors plutôt aux matériaux réalisant des symétries cubiques, alors que réciproquement on choisira des matériaux à symétrie hexagonale pour réaliser des aimants.

L'anisotropie magnétocristalline constitue donc un paramètre clef pour le contrôle des propriétés d'usage. La gamme des amplitudes des coefficients d'anisotropie associées aux divers matériaux développés à des fins applicatives varie ainsi dans des proportions colossales, réalisant des valeurs de quelques J/m3 pour les nuances les plus perméables (FeNi de type Permalloys, amorphes à base Cobalt et nanocristallins ultra doux ) jusqu'à 1,7.10^7 pour les alliages SmCo les plus durs.
 

mise à jour le 22 novembre 2018

Université Grenoble Alpes