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Nous étudions le phénomène de multiplication de parois de Bloch sous l'action des courants induits développés en régime d'aimantation dynamique. On utilise pour cela des échantillons nanocristallins ultradoux de type Nanophy fournis par l'entreprise ArcelorMittal Imphy.
Les matériaux magnétiques sont constitués de domaines de polarisation magnétique uniforme appelés domaines de Weiss, séparés par des parois de Bloch (en rouge sur la figure 1(a)). Sous l'effet d'un champ appliqué, les parois se déplacent occasionnant dans les zones balayées des variations d'aimantation. Des forces électromotrices proportionnelles à la vitesse des parois en résultent et des boucles de courants induits (en vert sur la figure 1(b)) sont générées autour des parois en mouvement. Comme dans un solénoïde épais, ces boucles de courant génèrent un champ d'excitation induit Hj, et finalement une force de freinage F (en mauve sur la figure 1(a)).
Un point important est que la force de freinage F est plus forte dans la partie centrale que au voisinage de la surface du ruban. En fonction de sa rigidité, donc de son énergie w, la paroi se déforme alors (figure 1(b)) pour finir par se casser (figure 1(c)) quand Ha atteint une valeur critique Hcr proportionnel à l'énergie de la paroi.
Protocole de base
A une fréquence donnée, on décrit des cycles d'hystérésis successifs pour des excursions de champ appliqué Ham croissantes, le but étant de déterminer l'excursion que l'on identifiera à Hcr pour laquelle un changement brutal se produit sur le cycle ou sur la perméabilité d'amplitude µ = Bm/Ham.
On travaille avec des excursions d'aimantations limitées à Js/2 afin que l'annihilation des parois qui accompagne l'entrée en saturation ne masque pas l'effet de la multiplication de parois. Il s'ensuit que la multiplication n'apparaît qu'au-delà d'une certaine fréquence d'aimantation.
La figure 3 montre la réalité du phénomène, obtenu ici pour une fréquence f = 30 kHz. La série de 14 cycles représentée est obtenue en augmentant progressivement Hmax. On a entre deux cycles successifs un incrément DBmax/Bmax de 0.2 % comparable à l'incrément DHmax/Hmax (cycles 1 à 7 et 8 à 14). Le passage du cycle 7 au cycle 8 se caractérise par un incrément DBmax/Bmax de 22 %. On évalue ainsi le champ critique Hcr = 8 A/m.
Figure 3 : Illustration du phénomène de multiplication.
Automatisation de la procédure
On peut caractériser la multiplication à l'aide d'un protocole plus aisé à mettre en œuvre : on génère pour cela une onde d'excitation constituée de 500 périodes, d'amplitude lentement croissante et on enregistre de manière synchronisée le signal secondaire.
L'analyse des enveloppes permet de repérer l'apparition de la multiplication, trahie par un accident sur la réponse enregistrée au bobinage secondaire de l'échantillon (figure 4).
Figure 4 : Mesure automatisée (f=30 kHz) (a) évolution temporelle de H et (b) évolution temporelle du signal secondaire
Le Random Anisotropy Model montre en effet qu'il faut substituer au concept d'anisotropie magnétocristalline, l'anisotropie effective Keff. La valeur de Keff est le résultat d'un moyennage qui n'est perceptible qu'à l'échelle de la paroi de sorte que cette grandeur clef ne peut être appréhendée qu'au travers de manifestations mettant en jeu les parois. L'effet de multiplication est donc particulièrement bien indiqué pour déterminer cette grandeur. On formalise les choses de la manière suivante :
On montre en premier lieu que Hcr s'exprime en fonction de l'énergie w de la paroi, de la polarisation à saturation Js et de l'épaisseur e selon :
On connaît par ailleurs, pour un matériau cristallin classique, l'expression de l'énergie de paroi en fonction de la constante d'échange ferromagnétique A et de la constante d'anisotropie magnétocristalline K0 :
Pour les matériaux nanocristallins, on remplace dans l'expression précédente la constante cristalline K0 par l'anisotropie effective Keff. On obtient alors la relation
mise à jour le 22 novembre 2018